venerdì 25 marzo 2011

La carte routière


Le film de Buster Keaton ne donnait cette image que de façon fugitive ; il ne donnait que son installation, non son état ou sa durée.
C'est donc ici un tout autre champ et une sorte de compensation du scénario (et de cette perte d'image qu'est la possibilité narrative) dont la suite nous est donnée. C'est fantasmatiquement la durée saisie par un corps immobile ; une telle durée ne peut se representer, elle se résout à la production de quelques attributs géants du corps. Ainsi la carte routière n'est plus faite pour dessiner (pointiller) un territoire, des trajets, une échelle qui ne représenteront pas cette anatomie invisible. C'est pourtant ce qui dissimule ce personnage qui devrait le guider… Cette lecture est absurde, elle est sollicitée, elle interprète ? elle n'est pourtant que l'image, elle n'est, de plus, que la solitude de cette image.

Que s'est-il passé ? l'isolement et la destination de cette image — nul n'eût jamais songé (ni réussi) à photographier aussi malicieusement un parent ou un ami — sont une espèce de produit : il a fallu qu'un préalable de mouvements ou d'actions soit encore sensible en elle, que tout un complot d'aventures s'y devine déjà pour que nous la percevions comme un isolement momentané et comme cette suspension de signification dans laquelle notre lecture peut ici rôder et s'affoler dans la composition de ses éléments essentiels. Tout le sens et la force motrice du film disparus ne nous laissent ici (et nous accordent déjà) que la possibilité d'y contempler du destin. Celui-ci n'est pas narratif, et tout juste pouvons-nous soupçonner qu'il l'ait été ; il est physique. Que s'est-il passé ? il reste pour nous ce personnage pourvu d'un poids et d'une surface de papier. C'est donc l'assurance qu'il est lisible, qu'il est caché, que rien n'est écrit sur lui, qu'il est donc indéchiffrable. C'est, avant même, la certitude que cela est un jeu, que ce poids de papier n'est pas destiné à durer mais que nous seuls pourrions lire la carte dans laquelle il s'est collé comme un insecte. Un personnage a été englouti par ce planisphère, l'Amérique dessine vaguement un sexe à ce corps plaqué à du papier tue-mouches.
Jean Louis Schefer, L'Homme ordinaire du cinéma, Paris 1997 (prima ed. 1980), pp. 66-7. (Traduzione eroica di Michele Canosa, Quodlibet, Macerata 2006, ma dannazione non riesco proprio a ritrovare il libro nel caos domestico.)

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